Que célèbre-t-on lors du solstice d’hiver? La Lumière…

La nuit la plus longue de l’année nous relie à Janus et à la Lumière. C’est cette Lumière qui nous guide vers un monde meilleur.

Cette planche a été lue dans le cadre de notre tenue blanche ouverte pour le solstice d’hiver 2017. Une tenue blanche ouverte est une tenue ouverte aux non maçons.

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Chères visiteuses et chers visiteurs,

Nous sommes ensemble aujourd’hui pour célébrer le Solstice d’Hiver.

Mais que célèbre-t-on au juste ?

Nous vous devons, chères visiteuses et chers visiteurs, une explication, à tout le moins.

Traditionnellement, et je pèse mes mots, car cette tradition remonte à la nuit des temps, deux solstices sont célébrés. 

Le Solstice d’été le 24 juin marque le jour le plus long de l’année.

Le Solstice d’hiver, celui qui nous occupe, le 27 décembre, marque le jour le plus court. C’est donc aussi la nuit la plus longue. Dès cette date, les jours rallongent et les nuits, partant, raccourcissent. 

Symboliquement, nous sortons ainsi du jour le plus sombre et nous filons vers la Lumière, vers le soleil, qui sera de plomb dans 6 mois.

Voilà ce que nous célébrons. La fin de l’obscurité et des ténèbres. Nous travaillons jusqu’au Solstice d’Été, où le soleil et la Lumière parviennent à leur apogée de puissance et de rayonnement.

Ce ne sera pas pour autant le moment de trouver le repos, il restera tant à faire, notre travail sera à peine dégrossi, mais nous pourrons nous féliciter de ce qui a déjà été accompli au terme d’un cycle, avant de reprendre nos outils et de continuer notre ouvrage. Un nouveau cycle recommence. On pourrait croire que tout cela ne sert à rien, que, tel Sisyphe, nous poussons vainement notre pierre. Mais à chaque fois, on laisse derrière nous un travail plus abouti et nous-mêmes, ou d’autres, pourront le poursuivre. 

On retrouve la trace des solstices dans la Rome antique, où les Collegia Fabrorum*, corporation d’artisans constructeurs remontant au VIIIe siècle avant Jésus Christ, avaient comme dieu Janus et célébraient en son honneur les deux solstices. 

Janus sur une monnaie romaine, 1er siècle avant J.C., source Wikipedia

Janus était ce dieu aux deux visages, l’un de vieillard tourné vers le passé et l’autre de jeune homme contemplant l’avenir. On peut aussi dire qu’il regarde à la fois vers la phase ascendante du soleil et vers sa phase descendante*. 

Il a la sagesse des Maîtres et la curiosité fougueuse des Apprentis. 

Janus est représenté avec des clés, car pour les romains, Janus est le dieu des portes et préside aux chemins. Il est donc aussi le dieu de l’initiation, de l’initiation aux mystères, et les Collegia Fabrorum le prennent ainsi pour patron. Car les bâtisseurs ne transmettaient leur Art qu’à ceux qui méritaient d’être initiés à son mystère. Ce mystère qui permettait aux constructeurs de rassembler des matériaux épars pour réaliser leur édifice.

Dans le monde chrétien, ces deux dates se rapportent à la St Jean, héritiers de Janus aux deux visages qui a donné deux Jean.

St Jean Baptiste pour le solstice d’été et St Jean l’Évangéliste pour le solstice d’hiver qui nous occupe aujourd’hui.

Son évangile est dit l’Évangile de la Lumière. Encore elle.  

Son symbole est l’aigle, oiseau divin attribué à Jupiter, et avant lui à Zeus, le dieu du… Soleil, oiseau doté d’une remarquable et redoutable acuité visuelle.

La tradition de l’initiation évoquée avec Janus a perduré jusqu’aux corporations d’artisans du Moyen Age et au Compagnonnage. 

Le chemin initiatique est ainsi le chemin de la Lumière qui nous éloigne des ténèbres. 

Il débute aujourd’hui, au Solstice d’hiver.

Revenons à Janus. Janus, dieu de la Paix, Janus, célébré durant trois jours par les romains en souvenir de l’Age d’Or où l’on vivait en paix et dans l’abondance, trois jours durant lesquels tous étaient égaux, sans maître, ni esclave, trois jours seulement.

Janus a bien d’autres mystères. Souvent les choses vont par trois. Janus contemplait à la fois le passé et l’avenir disions-nous. Il avait aussi une troisième face, invisible aux non-initiés. 

Entre le passé qui n’est déjà plus et l’avenir qui n’est pas encore, il y a l’éternel présent** que contemple cette troisième face qui est, au fond, le vrai visage de Janus.

Où est la réalité, où est la Vérité, si ce n’est dans le présent? Et comment peut-on la voir si on est dépourvu de Lumière?

Une lumière qui donne la vie, qui nous crée, nous constitue et nous reçoit. 

Une lumière qui explique et nous éclaire, sur nous-mêmes et ce qui nous entoure, une lumière qui a le pouvoir de sortir de nous et de chasser l’ombre, l’ombre synonyme d’ignorance, comme la nuit noire crée la peur pour obscurcir nos pensées.

Par la Lumière, nous pouvons voir la Vérité, en nous et autour de nous. 

La Franc-Maçonnerie spéculative est née alors que l’humanité acquiert sa liberté et sa raison, durant le siècle des… Lumières.

On pourrait, on aimerait, croire que le travail est achevé et que nos réunions ne servent plus que nos aspirations spirituelles, culinaires et épicuriennes.

Je crains qu’il n’en soit rien.

Nous avons, aujourd’hui plus que jamais, besoin de Lumière, alors que les obscurantistes de tout bord érigent des obstacles à la raison, à la science, et sabotent délibérément les espoirs de paix. Et cela se passe sous nos yeux,  ici et maintenant.

La déstabilisation que les puissances occidentales ont importé au Moyen-Orient, pour d’obscures raisons, exporte aujourd’hui en occident leurs idées radicales et leurs réfugiés. Qui à leur tour déchaînent les populismes qui prospèrent sur fond de crise économique. De part et d’autre, chacun invoque les esprits, économiques pour les uns, nationalistes ou religieux pour les autres. A leur manière, tous veulent retourner à un passé qui rassure, de peur d’emprunter le chemin de l’avenir fraternel et de la raison, loin des constructions imaginaires qui nous divisent. 

Dans une vaine tentative de repli, d’aucuns voudraient se barricader derrière des frontières mythiques de papier. 

Mais à l’abri derrière son mur, qui est vraiment en prison ? 

A réhabiliter la loi du plus fort, la loi du vainqueur et du vaincu, le jeu à somme nulle, c’est l’homme sauvage des cavernes que nous réhabilitons, avant qu’il invente la Lumière du feu, de la civilisation, du droit et de la justice.

Nous voyons aujourd’hui à l’œuvre une vaste entreprise de dérégulation et de sortie du droit international à tous les niveaux. Un travail est à l’œuvre, oui, mais pas celui que nous évoquons dans nos tenues. Des coups de boutoir ébranlent l’édifice lentement construit de règles et de droit international qui nous lient fraternellement par un destin commun. 

Je ne veux pas vivre en prison, ou dans l’ombre froide et humide des cavernes.

A ceux qui seraient tentés d’exclure, en usant de ce qui nous différencie, je veux dire que nous pouvons rassembler, en décidant plutôt de porter notre attention sur ce que nous avons en commun.

Souvenons-nous des heures sombres du début du siècle dernier, avec ce même enchaînement de laisser-faire financier, de conflits militaires illégitimes et mal réglés, d’esprit revanchard, de provocations, de misère économique, de populisme, qui ont plongé le monde au bord de sa fin et lui ont fait perdre son humanité.

Comme Janus, nous devons connaître le passé, pour éclairer le présent et préparer un avenir de paix et d’Age d’Or.

« Le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde », écrivait Bertolt Brecht.

Est-on vraiment à l’abri ?

Ce n’est pas encore la nuit, mais déjà la pénombre.

Restons vigilants. Brandissons la Lumière. Élevons nos cœurs et nos esprits.

La raison, l’éducation, et avec elles la science, la liberté, l’égalité, la fraternité comme liant indispensable pour atteindre le maximum de l’un et de l’autre, et donc la paix et l’harmonie, la tolérance, le respect, les Droits de l’Homme et plus encore de l’Humanité et donc de l’Environnement, 

la voilà ma Lumière, mes Lumières, maintenant, toujours et partout, éclairant mon chemin vers un monde meilleur.

J’ai dit.

Un Frère de Mozart et Voltaire


Sources

* ledifice.net https://www.ledifice.net/P033-6.html,

** Le symbolisme solsticial de Janus, René Guénon, https://legendehiram.blogspot.com/2018/09/guenon-le-symbolisme-solsticial-de-janus.html  

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