Crédit photo: Fresque d’enfants d’une école genevoise
Cette planche a été présentée lors de la Tenue Blanche Ouverte solsticiale du 18 décembre 1999. Une Tenue Blanche Ouverte est une tenue ouverte aux non maçons.
Vénérable Maître, Dignitaires qui décorez l’Orient et vous tous mes Sœurs et mes Frères en vos Grades et Qualités, chers amis,
Permettez-moi de commencer ce travail par un peu d’histoire.
Un peu d’Histoire
Au-delà de la Révolution française, il y a des hommes qui réfléchissent sur les rapports entre l’individu et la société, le peuple et les gouvernants.
Un de ces hommes s’appelle Hammourabi; il vit à Babylone en 1700 av. JC et rédige un code de lois par lequel il veut « Faire éclater la justice pour empêcher le puissant de faire tort au faible ».
Au 13ème siècle av. JC, Moïse reçoit les « Tables de la Loi » dictées par Yahvé.
Plus tard, dans Antigone, Sophocle place « la conscience individuelle au dessus de la loi humaine ». Platon recherche justice et l’altérité, Aristote l’équité.
En Chine, au 2ème siècle av JC , SiunTseu écrit « Qu’est-ce qui rend la société possible? Les droits de l’individu. »
Sénèque affirme, au 1er siècle après JC, que « l’homme est une chose sacrée pour l’homme ».
Augustin, au 5ème siècle, évoque le concept de justice et ouvre la voie à la contestation au nom de la liberté de conscience.
Enfin le Coran proclame « l’être humain est la créature qui mérite un respect inconditionnel. »
Ni récents, ni exclusivement occidentaux, les Droits de l’Homme doivent attendre le 17ème siècle pour devenir les bases de la Constitution anglaise, victoire sur l’absolutisme des Stuart.
Enfin le 18ème et les Lumières, l’Idée d’une société démocratique avec une justice pour tous, la sécurité et le droit au bonheur. Le 9 juillet 1789 ces principes guident les travaux de l’Assemblée nationale constituante qui met fin à l’absolutisme royal en France. Le 26 août 1789 l’Assemblée nationale proclame la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, définissant des droits naturels, inaliénables et sacrés dont le plus précieux est la Liberté.
Après la Révolution russe de 1917, les classes sociales défavorisées vont pousser progressivement les démocraties libérales à prendre en compte les droits collectifs et sociaux de la personne humaine.
Quelques années de barbarie plus loin, en 1948, le 10 décembre, est adopté le texte final de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Cette Déclaration n’ayant pas de force juridique obligatoire est suivie de Pactes qui engageront les États qui les ont signés.
Pour refermer cet aspect historique, je voudrais vous faire écouter un document sonore daté de 1948 dans lequel le journaliste Albert Atcard interroge René CASSIN, prix Nobel de la Paix, sur les différences entre la Déclaration de l’Homme et du Citoyen et la Déclaration universelle des Droits de l’Homme:
Document audio de l’INA, René Cassin, 1948
Encore quelques chiffres : depuis 1945, 130 conflits majeurs ont eu lieu dans le monde provoquant la mort de 40 millions de personnes, soit 2’100 humains par jour, presque autant que lors de la deuxième guerre mondiale, plus les violations quotidiennes en Algérie, en Iran, en Afghanistan, le travail forcé des enfants en Inde et 1.3 milliard d’êtres humains vivant avec moins d’un dollar par jour…
L’écœurement, la tristesse, l’incompréhension, la révolte et le sentiment d’impuissance surgissent en nous. Ne ferait-on pas mieux, comme les trois singes de la fable, de se mettre les mains devant les yeux pour éviter de voir, sur les oreilles pour éviter d’entendre et devant la bouche pour éviter de parler? C’est ce qu’on fait la plupart du temps. Mais peut-on s’empêcher de penser? Penser par exemple à ce paradoxe de la destinée humaine: prédateur comme l’atteste notre héritage biologique et entité dotée de conscience et d’idéal d’élévation comme l’attestent toutes les Cultures. Pour la philosophe Jeanne HERSCH, les Droits de l’Homme sont contre nature dans le sens où la nature est le règne de la force, mais conformes à la nature humaine et à son appel de Liberté.
L’avenir des Droits de l’Homme
Pour Mary ROBINSON, Haut Commissaire des Droits de l’Homme, et Koffi ANNAN, l’avenir des Droits de l’Homme passera par la prévention. Les Nations unies aideront la mise en place de structures nationales en faveur des Droits de l’Homme en vue d’inculquer une culture des Droits de l’Homme afin que les individus se sentent maîtres de leur destinée.
La création récente de la Cour pénale internationale va renforcer le droit d’ingérence de la communauté internationale dans des gouvernements qui pourront de moins en moins refuser ce droit sous prétexte que cela ne concerne que leurs affaires intérieures.
Au sujet de l’élargissement des droits économiques, sociaux et culturels dans les pays en voie de développement Mary ROBINSON soutient ceux qui militent pour l’annulation de la dette des pays les plus pauvres.
Enfin l’éducation. La Déclaration des Droits de l’Homme est maintenant disponible dans plus de 250 langues et les écoles du monde entier sont encouragées par leur ministère de l’éducation à les afficher. A Genève nous venons de fêter le 10ème anniversaire de l’adoption par les Nations unies de la Convention sur les Droits de l’Enfant et dans chaque classe de l’enseignement primaire se trouve une affiche de ces Droits de l’enfant.
Enfin la Haut Commissaire aux Droits de l’Homme fait un appel: « Pour atteindre les objectifs que j’ai soulignés, il faudra la participation de tous les acteurs concernés par les Droits de l’Homme: les gouvernements, les ONG, les organes des Nations unies, les institutions financières internationales, la communauté économique et tous ceux prêts à se battre pour un idéal. »
Un ami avec qui je parlais de ces Droits me dit au moment de se quitter « Mais comment les faire appliquer? ». J’ai ressenti dans cette phrase le réalisme triste et résigné d’un profane. C’est dans ces moments que je ressens de la confiance dans la Franc-Maçonnerie.
Enthousiasme, mon Frère Georges? Tu me demandais de parler de mon enthousiasme.
Alors je peux te dire que cette réflexion sur les Droits de l’Homme vient, comme une pièce de puzzle ou… la pierre d’un mur, trouver prolongement dans mon travail artistique en cours.
Enthousiasme encore à découvrir ces textes comparés par un de nos Frères à une statue poussiéreuse.
Confronté à produire ce travail d’apprenti j’ai commencé à dépoussiérer la statue.
Ce n’est pas une statue. Non mon Frère, cette forme humaine recouverte de poussière n’est pas une statue, c’est un être humain. Un être humain silencieux, c’est notre âme.
J’ai dit.
Un Frère de Mozart et Voltaire